L’Ontario privatise la vente de cannabis
L’Ontario a publié des règlements en vertu de la Loi de 2018 sur les licences liées au cannabis[1] (la Loi) pour clarifier certaines questions relatives à la délivrance de permis et à l’exploitation de magasins privés de cannabis (le Règlement).[2] Comme il est mentionné dans le bulletin d’Actualités Osler concernant le régime réglementaire sur le cannabis de l’Ontario, le gouvernement conservateur a déjà adopté une loi qui, une fois en vigueur, établira le système privé de vente au détail de cannabis récréatif de l’Ontario le 1er avril 2019 sous la supervision de la Commission des alcools et des jeux de l’Ontario (COJA).[3] Selon la procureure générale Caroline Mulroney, « [l]’objet de ces règlements est de veiller à la sécurité des enfants et d’assurer que tous ceux qui exercent des activités dans ce système étroitement réglementé se conduisent avec intégrité, honnêteté et dans l’intérêt public. »[4]
En complément de la Loi, le Règlement fournit des détails supplémentaires concernant (1) le processus de demande de licences d’exploitation, (2) les limites de concentration du marché, (3) les implications sur la capacité des producteurs autorisés par le gouvernement fédéral à établir des magasins de détail et (4) d’autres questions.
(1) Processus de demande de licences d’exploitation
Le processus de demande de licences d’exploitation d’un magasin de vente au détail sera lancé le 17 décembre 2018. Encore une fois, le gouvernement a réitéré que les détaillants de cannabis illégaux exerçant des activités après le 17 octobre ne sont pas admissibles à une licence de vente de cannabis de l’Ontario.[5] Jusqu’au 1er avril 2019, le cannabis ne peut être acheté légalement qu’au magasin de cannabis de l’Ontario en ligne. De plus, aucune licence ne sera délivrée à un individu ou à une organisation qui est associée au crime organisé, et les demandeurs doivent démontrer leur conformité aux lois fiscales afin de prouver qu’il est en règle avec le gouvernement.[6]
(2) Limites de concentration du marché
Le gouvernement a également annoncé une « limite de concentration du marché » de 75 magasins par exploitant.[7] Selon le ministère du Procureur général, cette limite a été établie afin d’éviter un niveau élevé de concentration du marché, de promouvoir les débouchés pour les petites entreprises et d’encourager les investissements dans le secteur de la vente au détail de cannabis.[8]
(3) Implications pour les producteurs autorisés
Le Règlement fournit maintenant de plus amples renseignements sur la façon dont les producteurs autorisés peuvent participer à la vente au détail de cannabis en Ontario (i) en ajoutant des restrictions supplémentaires et (ii) en définissant le terme « membres du même groupe » en vertu de la Loi.
La Loi prévoit que chaque producteur autorisé et les membres du même groupe ne peuvent détenir entre eux plus d’une autorisation de magasin de vente au détail.[9] Cependant, la façon dont cette autorisation peut être délivrée n’est pas tout à fait claire étant donné que a) les autorisations de magasin au détail ne peuvent être délivrées qu’à un titulaire (ou à l’auteur d’une demande) de licence d’exploitation pour vente au détail, et b) le nouveau Règlement stipule qu’une personne morale n’est pas admissible à une licence d’exploitation pour vente au détail si un ou plusieurs producteurs autorisés ou les membres du même groupe qu’eux sont propriétaires ou ont le contrôle, direct ou indirect, de plus de 9,9 % de celle-ci.[10]
Le Règlement inclut également une définition large de ce qui constitue un « membre du même groupe ». Cela impose en fait certaines limites aux producteurs autorisés en ce qui a trait au recours à des stratégies comme la participation majoritaire ou minoritaire, les coentreprises, les sociétés de personnes, les fiducies et les autres structures pour contourner la restriction mentionnée ci-dessus d’une autorisation de magasin de vente au détail par producteur autorisé et les membres du même groupe.[11] Le Règlement vise également les situations où une partie agit conjointement ou de concert avec une autre personne pour posséder un intérêt bénéficiaire dans des actions de la personne morale soit comportant au moins 50 % des voix nécessaires à l’élection des administrateurs de la personne morale soit dont la juste valeur marchande correspond à au moins 50 % de la juste valeur marchande de toutes les actions émises et en circulation de la personne morale.[12] Le Règlement stipule aussi qu’une personne est réputée membre du même groupe si le producteur autorisé « a une influence directe ou indirecte dont l’exercice éventuel entraînerait un contrôle de fait sur la personne. »[13]
D’autres restrictions qui ne sont pas citées ci-dessus s’appliquent aux producteurs autorisés en Ontario. Cependant, avec les limites de concentration du marché, le Règlement communique clairement l’intention de faire en sorte que le marché de détail du cannabis ne soit pas monopolisé par de grands acteurs. Cette intention s’inscrit dans la lignée des commentaires antérieurs du ministre des Finances Vic Fedeli, qui a précisé vouloir ouvrir le marché et offrir l’occasion aux petites entreprises de participer. Il a fait savoir que le gouvernement souhaitait que le plus grand nombre possible de joueurs participent.[14]
(4) Autres questions et faits saillants.
- Magasins autonomes : Le règlement stipule également que le cannabis doit être vendu dans des magasins autonomes, ce qui signifie que les établissements commerciaux tels que les pharmacies ou les épiceries ne pourront pas vendre du cannabis et que les personnes de moins de 19 ans ne pourront pas y entrer.[15]
- Objection pour l’intérêt public : Bien que la Loi permette aux municipalités de s’opposer aux autorisations des magasins de vente au détail pour des questions d’intérêt public, le Règlement stipule que la COJA ne considérera que ce qui suit comme des « questions d’intérêt public » : (1) la protection de la santé et de la sécurité publiques; (2) la protection des jeunes et la restriction de l’accès au cannabis par ceux-ci; et (3) la prévention des activités illicites relativement au cannabis.[16]
- Limites sur les articles supplémentaires qui peuvent être vendus : En plus du cannabis acheté de la Société ontarienne de vente du cannabis, seuls les accessoires liés à la consommation du cannabis et les sacs d’emplettes peuvent être vendus dans un magasin de vente au détail de cannabis.[17]
- Aucune entente de distribution de cannabis : Le titulaire d’une autorisation de magasin de vente au détail ne doit pas conclure avec une personne ou entité de contrat ou d’accord visant la prestation de services de distribution de cannabis, sauf avec la Société ontarienne de vente du cannabis ou les employés du titulaire.[18]
- Autres détails pratiques : Les magasins de vente au détail sont autorisés à ouvrir de 9 h à 23 h tous les jours.[19] Quiconque travaille dans l’un de ces magasins sera tenu d’avoir réussi le programme de formation approuvé par le gouvernement sur la vente responsable de cannabis.[20] Les magasins ne peuvent se trouver à moins de 150 mètres d’une école.[21] Le gouvernement a annoncé qu’il débloquera 40 millions de dollars sur deux ans pour aider les municipalités à couvrir les frais de mise en œuvre.[22]
Pour obtenir des renseignements supplémentaires sur le régime réglementaire sur le cannabis de l’Ontario, veuillez consulter notre précédent bulletin d’Actualités Osler à ce sujet.
[1] LO 2018, chap. 12, Annexe 2. [Loi de 2018 sur les licences liées au cannabis]
[2] Règl. de l’Ont. 468/18 [Règlement]
[3] Ministère du Procureur général, L’Ontario établit des règlements rigoureux pour la délivrance des licences et l’exploitation de magasins privés de cannabis, (14 novembre 2018) en ligne : Gouvernement de l’Ontario. [MPG]
[4] MPG, supra note 3.
[5] Ibid.
[6] Règlement, supra note 2, article 3(2).
[7] Règlement, supra note 2, article 12.
[8] MPG, supra note 3.
[9] Loi de 2018 sur les licences liées au cannabis, supra note 1, article 4(4).
[10] Voir la Loi de 2018 sur les licences liées au cannabis, supra note 1, article 4(4) et le Règlement, supra note 2, article 7.
[11] Règlement, supra note 2, article 2(1).
[12] Règlement, supra note 2, article 2(2).
[13] Règlement, supra note 2, article 2(3).
[14] Justin Giovannetti, Christina Pellegrini et Marina Strauss, « Ontario proposes capping number of stores for cannabis growers, open market for recreational sales. » (L’Ontario propose de plafonner le nombre de magasins pour les cultivateurs de cannabis et d’ouvrir le marché aux ventes récréatives) (26 septembre 2018), en ligne : The Globe & Mail.
[15] Règlement, supra note 2, article 9.
[16] Règlement, supra note 2, article 10.
[17] Règlement, supra note 2, article 18.
[18] Règlement, supra note 2, article 14.
[19] Règlement, supra note 2, article 17.
[20] Règlement, supra note 2, article 21.
[21] Règlement, supra note 2, article 11.
[22] MPG, supra note 3.