Banquet du 10e anniversaire de l’Association des Juristes Italo-Canadiens du Québec (AJICQ) en photos

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Banquet du 10e anniversaire de l’Association des Juristes Italo-Canadiens du Québec (AJICQ) en photos

Plaidoyer pour une société plus intègre

Le banquet célébrant le 10ième anniversaire de fondation de l’Association des Juristes Italos-Canadiens du Québec (AJICQ) a rendu un vibrant hommage à son fondateur, l’honorable juge Antonio Discepola de la Cour municipale de Montréal. Avec son bagoût légendaire il a rapidement suscité l’hilarité collective avec ses farces, ses « one-liners » du genre : je ne voulais pas faire de discours car j’avais peur de mettre en faillite ce regroupement de juristes. Ajoutant que selon Me Mario Spina, le doyen des juristes Italiens, il n’y avait rien à craindre car tous avaient payé leur billet avant de pénétrer dans cette salle comble comparable au nombre de personnes présentes lors du « banquet en l’honneur Iacobucci de la Cour suprême du Canada » il y a quelques années, dit-il avec fierté. En effet le nombre présent se chiffrait à 195 personnes.

Reconnu pour son pince-sans-rire, celui que ses amis appellent amicalement Tony, a rappelé les difficultés, les humiliations et l’attitude clairement raciste rencontrées par les familles Italiennes immigrées au Canada et à Montréal durant les dures années de guerre alors que l’Italie de Mussolini était considérée l’ennemie, au point où plusieurs citoyens d’origine italienne ont été emprisonnés dans des camps de concentration sur l’Isle Ste Hélène et ailleurs au Canada durant la dernière guerre.

Il ne se gène pas de souligner ses modestes origines en soulignant qu’il est né à la leurre d’une chandelle dans un village qui n’avait pas d’eau courante, pas d’électricité dans la maison ni les rues, pas d’eau chaude, pas de garderie, pas de sucre, pas de café, pas de livres, pas de crayons, pas d’Ipad, aucune auto dans les rues, et où les enfants ne mangeaient pas à leur faim.

Ses parents n’ont jamais mis les pieds dans une classe d’école, son père a appris à écrire un peu de lui-même. Il se souvient lorsque son père insistait de voir ses bulletins scolaires, pourtant il ne pouvait les lire. Il les regardait et lui remettaient en disant che dice… qu’est-ce que ça dit ?

Il est d’avis qu’il a grandit à une époque, où, avec les barèmes d’aujourd’hui, la DPJ l’aurait placé en foyer d’accueil.

Ses parents ne lui ont jamais donné de câlins et n’ont jamais prononcé les mots je t’aime à son égard. Il n’a jamais reçu de carte ou un cadeau pour son anniversaire. Il réalisa plus tard que ce n’était pas nécessaire. Leur amour pour lui, il le constatait tous les matins lorsqu’ils allaient faire un travail souvent minable, il comprenait ce qu’ils faisaient pour lui. Il est d’avis qu’il a réussi parce qu’ils ont sacrifié leur santé et conforts matériel pour leur famille.

Ses parents ont été très durs pour lui mais jamais abusif… alors qu’il était jeune il n’avait pas beaucoup de tendre mots à leur égard et naturellement il le regrette beaucoup aujourd’hui…ce n’est que plus tard qu’il ai compris que le seul but de leurs punitions était de faire de lui une bonne personne…jamais pour servir leurs besoins à eux.

Durant son enfance à Montréal, les enfants canadiens-français et Italiens s’affrontaient régulièrement dans les ruelles se criant des insultes entre deux coups de poing et un de pied bien senti… Ces affrontements fréquents ont pavé la voie à des amitiés durables et fécondes par la suite, dit-il sans regret.

· D’abord arrivé en Saskatchewan après 10 jours de mer et 7 jours de train, sa famille est venue s’installer à Montréal par la suite où il a grandi dans le secteur de la petite Italie. Les choses ont beaucoup changé grâce au travail des gens de la communauté italienne de la région de Montréal et d’ailleurs.

Le juge a même évoqué ce qui s’est dit à la Commission Charbonneau sur « certains » qui « ne pourra éclipser tout ça…» citant un proverbe italien qu’il a traduit par « on peut jeter l’or dans la boue mais il ne se salira pas… »

· « Nous n’avons pas à avoir honte de ce que nous sommes… » lança-t-il avec fierté du haut du podium de la salle de bal du Rizz remplie de professionnels du droit, d’hommes et femmes d’affaires majoritairement d’origine italienne fort bien implantés, devenus des leaders de notre société.

· Il a souligné l’importance de se remémorer leurs origines. L’Italie a été le berceau d’intellectuels, savants, explorateurs, musiciens et artistes. Le génie Italien a attiré l’attention du monde dans les domaines de la mode, du design au point que le « made in Italy » renvoie immanquablement à un style de bon goût incomparable.

Les sacrifices de générations d’émigrants ont contribué à maintenir très haut les couleurs du pays aux quatre coins du monde, lui valant une estime unanime.

À titre d’exemple il a souligné que le latin à donné naissance aux 2 langues officiel de ce pays, Leonardo da Vinci, Michelangelo, la première université à Bologne, Meucci inventeur du téléphone, l’invention de la fourchette, le fleur de lis sur le drapeau de ce pays de Florence, le Régiment de Carignan originaire du nord d’Italie, le nom de l’Amérique d’ Amerigo Vespucci, Volta inventeur de la pile, de grands explorateurs comme Verrazano avec qui Jacques Cartier a fait ses premières explorations en Amérique du Nord, Giovanni Caboto, Col. Burlamacchi qui prit part à plusieurs batailles pour la France contre Angleterre à Carillon et Ste Foy, Tonti qui accompagna l’explorateur français La Salle dans l’exploration des grands lacs, le nom même de la Ville de Montréal tire son origine de la Ville de Monreale en Sicile, le premier notaire de la Nouvelle-France le piémontais Rambaudi, et sur des sujets plus terre-à-terre, le Jacuzzi, Big Mac inventé par Delgatti, la crème glacée par Marcioni, la création du FBI par Bonaparte, Jo Di Maggio pour le baseball et 2 signataires de The Declaration of Independance des États-Unis: Paca et Rodny, l’architect de la coupole de la Maison Blanche, finalement l’apport inestimable du droit romain à notre droit incluant le principe que tous sont égaux devant la loi.

· Badinant sur les avantages d’être juge, « no rent, no personnel to worry about, no bills to collect, no one contraditcs you at least not in your face », cet ancien avocat qui a lancé un bureau de pratique privée qui existe toujours, a fait un plaidoyer pour l’intégrité, l’honnêteté dans la vie.

· Sa franchise l’honore d’appeler un chat, un chat « to keep it short and simple » avait rappelé le conseil qu’il avait donné à son arrivée à la cour à l’ancien procureur de la Couronne fédérale Ron Schachter qui l’a précédé au podium.

Si le juge Antonio Discepola adore son métier de juge à la Cour municipale de Montréal, il a un pincement au coeur pour ne pas dire un regret en songeant qu’il aurait aimé être transféré à la Cour du Québec.

En effet, après près de 20 ans à la cour municipale, il a demandé son transfert à la cour du Québec. Le Juge en Chef, d’à lors, a refusé de respecter les dispositions législatives régissant un tel transfert. Le juge Jean Guibault de la Cour supérieure a donné raison au juge A. Discepola (voir L’Hon. Juge Antonio Discepola c. L’Hon. Juge en Chef de la Cour du Québec 500-17-051101-098).Malgré cette victoire et sa compétence sans reproche, il demeure toujours au même poste à la Cour municipale de Montréal.

Il est à souligner que le juge A. Discepola est l’auteur de plus de 200 jugements écrit en matière pénal et criminel dont plusieurs ont été rapporté; et ce après avoir exercé en litige civil pendant 13 ans avant sa nomination.

· Cette « petite association » raille le conférencier, dont les détracteurs au début ne donnaient pas plus de trois ans de vie, qui a réussi à attirer le juge Antonin Scalia de la Cour Suprême des Etats-Unis, à son banquet annuel, puis Frank Iacobucci, autrefois de la Cour suprême du Canada, a franchi le cap de ses 10 ans, lança le fondateur.

L’Association des Juristes Italos-Canadiens du Québec (AJICQ) joue son rôle de transmission du droit et du respect des idéaux démocratiques qu’elle soutient dans la communauté italienne et dans les sociétés québécoise et canadienne.

· C’est le souhait du juge Antonio Discepola que s’épanouisse cet idéal qui pour lui se manifeste chaque jour lorsqu’il consulte le rôle de la cour municipale et constate qu’aucun nom italien n’y apparaît.

· « Each morning I check the list of the accused that will pass in front of me… and when I see no Italian names… it makes my day. »

· Et sans oublier que ce juriste qui a été commissaire à la Commission des lésions professionnelles après avoir pratiqué en cabinet privé aurait fort bien pu devenir économiste ou une carrière militaire s’il n’avait pas été attiré d’une main tendre vers le droit par son épouse.

Le sort du juge A. Discepola est partagé de nos jours par d’illustres professionnels d’origine italienne qui font l’honneur de leur communauté même si parfois certains d’entre eux se sont retrouvés témoins devant la Commission Charbonneau ce qui lui crève le coeur. Des Québécois francophones et non les moindres y sont entendus quotidiennement aussi et ils sont la majorité.

(Photos Michael Benigno)