Récemment assermentée au Barreau du Québec Me Claudia Di Iorio, transformer la tragédie en une opportunité de carrière.
(NDLR)- A la demande de l’éditeur du magazine Le Monde Juridique lequel a déjà publié des articles sous sa signature à la suite de son terrible accident de voiture en compagnie de ses deux amies, Claudia Di Iorio, nouveau membre du Barreau du Québec de la cohorte 2020, présente son parcours atypique à ses collègues du Barreau et à l’intention des futurs étudiants en droit ou ayant choisi une autre profession.
Victime d’un grave accident alors qu’elle était adolescente, une jeune avocate tout récemment assermentée se confie au Monde Juridique : « Ce sont les épreuves qui nous révèlent : c’est face au défi qu’on apprend à se surpasser. »
À l’âge de 16 ans, Claudia fréquente le Collège Notre-Dame. Elle est une élève qui réussit bien ses cours et s’implique autant comme présidente de classe que dans différentes équipes sportives du collège. Entourée d’amis, elle est heureuse et découvre les joies de s’impliquer dans la vie étudiante. Déjà, elle a gagné le prix de l’Élève de l’année à deux reprises et aspire à tant d’autres belles réalisations comme tous les jeunes de son âge.
Comme trop souvent, le malheur arrive de manière inattendue. Une fête d’été d’amis du secondaire de la mi-été se termine dans la tragédie quand ses deux meilleures amies et elle font confiance à l’ami d’un ami pour retourner à la maison. Après un long coma et de multiples chirurgies au cerveau et au bassin (entre autres), elle doit réapprendre plusieurs fonctions de base dont parler, écrire et compter. De plus, confinée à un fauteuil roulant, elle entreprend son combat pour réapprendre à marcher.
Sa motivation à retrouver toutes ses capacités est grande. Approchée par Paul Arcand pour participer dans son film Dérapages, elle y relate les terribles conséquences résultant d’une seule mauvaise décision. Dans cette histoire, personne n’y échappera. Ses deux amies et elle grièvement blessées, elles entreprendront un long parcours en réhabilitation. Le chauffard quant à lui aboutira au pénitencier. Sa volonté de contribuer au changement l’amène ainsi à s’impliquer au sein de sa communauté afin de donner un sens à ce qui lui est arrivé.
Sa mission : partager son histoire afin d’éviter que d’autres ne se retrouvent dans la même situation.
Son message : Profitez de la vie : oui ! Amusez-vous : oui ! Mais faites-le intelligemment.
Graduellement, elle retourne à l’école et entreprend un long parcours pour retrouver son succès scolaire, ce qui l’amènera éventuellement à étudier à la Faculté de droit de l’Université McGill. Parallèlement, elle donne des conférences afin de sensibiliser les jeunes dans différentes écoles, des CÉGEPS et universités.
Alors que plusieurs étudiants de première année en droit consacraient la majorité de leur temps à leurs cours et à l’étude, Claudia n’avait pas que cette priorité. Avec la collaboration du ministre du Transport, elle entreprend avec des représentants de la SAAQ une tournée dans 11 villes du Québec. Cette tournée de consultation populaire vise à rassembler les forces vives de la société afin de les mobiliser autour du même objectif : améliorer la sécurité routière. Cette consultation publique sert d’inspiration à un nouveau projet de réforme du Code de sécurité routière (CSR) qui mène à un projet de loi qui sera déposé par le ministre du Transport en décembre 2017. Elle sera présente comme invitée d’honneur de l’Assemblée nationale lors de l’adoption du projet de loi.
Impressionnée par ses connaissances et son engagement, la Société d’assurance automobile du Québec (SAAQ), sous la recommandation du ministre des Transports, fait d’elle la plus jeune administratrice d’une société publique dans l’histoire du Canada.
Simultanément, elle œuvre aussi activement depuis 2013 auprès du conseil d’administration du Bureau du taxi de Montréal (BTM) et œuvre à plusieurs projets, dont ceux de refaire l’image de marque de l’industrie du taxi, et est très active dans le projet Cool taxi, une initiative bénévole cofondée par son père* et ceux de ses deux amies lequel vise à promouvoir le raccompagnement sécuritaire des jeunes à la maison.
La course folle du chauffard qui a changé à jamais sa vie et celle de ses deux amies s’est terminée abruptement dans un arbre. Cette épreuve a réveillé en elle des ressources inédites et une capacité à transformer une tragédie en opportunité de développement autant communautaire que personnelle.
D’ailleurs, certaines épreuves sont personnelles, mais d’autres sont collectives, précise Me Claudia Di Iorio.
Après avoir obtenu son diplôme en droit civil et en common law de la faculté de droit de l’Université McGill, elle débute sa formation à l’école du Barreau à peine quelques jours après le Nouvel An 2020. Alors qu’elle est en plein envol comme beaucoup de jeunes de son âge, elle se retrouve face à ce mur qu’est la pandémie et les nombreuses restrictions qui sont imposées. Loin de se décourager, elle se mobilise avec les moyens du bord comme tant d’autres étudiants, tous privés d’interactions sociales.
La préparation d’examen se fait alors et soudainement en privé, vu l’interdiction d’être présent en classe. De quoi déstabiliser tous ces aspirants futurs avocats pour qui cette formation est un peu comme gravir le sommet de l’Himalaya. Acharnée, elle réussit avec brio l’examen du Barreau, et comme tous de sa promotion à travers le Canada (et ailleurs!), elle fait l’expérience du stage en télétravail pour devenir une Barreau 2020 assermentée en 2021! Une expérience qui la suivra toute sa vie, mais qui lui a aussi permis d’apprendre à reconnaître toutes les opportunités qui existent pour ce monde nouveau qui pendra forme dans l’ère post pandémique, affirme avec passion l’avocate Claudia Di Iorio.
Alors que sa plus grande force est de créer des liens avec des gens, elle s’adapte à nouveau et aborde les restrictions liées à la pandémie comme une opportunité pour relever des nouveaux défis qu’elle n’aurait pu anticiper. Moins de déplacements, aucun événement, de nouvelles rencontres rarissimes et à distance, certes, mais plus de lecture, de formations et de conférences web, et prendre le temps de s’impliquer différemment.
Collectivement, elle déplore certainement les difficultés engendrées par la pandémie, mais se réjouit aussi des bienfaits qu’elle aura eu sur la modernisation du système judiciaire.
À peine vaccinée, avec le vent de fraîcheur et de liberté qui souffle partout, elle entrevoit les prochaines années comme une réhabilitation collective. C’est en surmontant cette épreuve et en saisissant les opportunités que notre communauté se révèlera. Elle lance : « Le monde nous appartient, vous avez en vous des ressources insoupçonnées pour le rendre meilleur. Êtes-vous prêts à relever le défi ? »
*Me Nicola Di Iorio