Porsche Boxster GTS Le plaisir durable
Pour les automobilistes qui ne prennent pas leur véhicule pour un banal moyen de transport, anonyme et tout juste utilitaire, il y a lieu de croire qu’un sombre complot s’ourdit sous leurs yeux. En effet, si on dénombre les pourtant innombrables cônes orange, les nids-de-poule contagieux, les sournois photos radars, les limites de vitesse soporifiques et les quotas de constats d’infractions inavouables, il est évident que des autorités plus ou moins compétentes complotent pour priver les amateurs de conduite d’avoir du plaisir avec leur complice à quatre roues !
Ils ne restent plus à ces accrocs de la griserie mobile qu’à se diriger vers un circuit privé où ils pourront tourner en rond tout en donnant libre cours à leur perversité du volant. Ou alors à se résigner, entrer dans les rangs et attendre sagement l’avènement de la voiture autonome qui nous rendra tous égaux devant le dieu Ennui.
À moins, bien sûr, de mettre la main sur une automobile qui nous aide à voir la vie en rose même quand elle est festonnée de jalons orangés à perte de vue. Une auto si bien équilibrée qu’elle transforme n’importe quel virage ordinaire en apex sensoriel. Qui permet de bondir dans le trou inespéré du bouchon de circulation sans que personne ne s’en offusque parce qu’on n’attend rien de moins d’un véhicule qui commande le respect. Qui fait fondre la frustration de la limite de vitesse même en la respectant car ses habilités routières nous impriment constamment des sourires successifs sur le visage sans nous forcer à jouer au chat et à la souris avec le constable aux aguets.
En plus de nous transporter, cette automobile véhicule donc du bonheur. Nos routes du Québec ont beau vouloir mimer celles d’un pays bombardé du Moyen-Orient, cette automobile ne s’en formalise pas et transforme plutôt chaque kilomètre en pure évasion, peu importe l’ampleur du complot. En fait, plus vaste est ce dernier et plus l’auto puise dans son arsenal de vertus et de ruses pour métamorphoser chaque obstacle en défi amusant.
C’est en effet tout ce que peut accomplir pour vous une Porsche Boxster GTS.
Une génétique prometteuse
La marque Porsche n’a plus besoin d’introduction. Depuis que Ferdinand Porsche l’a créée en 1931, le nom est devenu synonyme de puissance échevelée mais harnachée par une sportivité scientifique. La Porsche est au connaisseur d’automobiles ce qu’une bouteille de Romanée-Conti évoque chez l’oenologue passionné.
La Boxster, née en 1997, ne charrie pas la légende de la 911, née elle en 1963, mais elle en emprunte heureusement plusieurs gènes athlétiques. Elle s’est auréolée d’une savoureuse personnalité qui rapproche son utilisateur de la béatitude.
Pour être honnête, depuis le fardier de Cugnot, l’homme trouve difficile de résister à un roadster. Comment pourraitil ? Allure sensuelle, toit baissé quand la météo collabore, conduite inspirée et égocentrisme de bon aloi grâce à ses deux places qui, le temps d’une balade rédemptrice, font oublier momentanément jusqu’aux petits-enfants merveilleux mais néanmoins exténuants.
Le roadster symbolise le rêve du jeune sans le sou et le cadeau de retraite de plusieurs conducteurs et conductrices qui refusent d’enterrer leur jeunesse trop vite.
Tant qu’au modèle GTS, c’est celui que choisit l’expert ou l’individu qui aspire à le devenir. C’est la quintessence de la Boxster. Vrai, il existe une 911 Cabriolet mais on ne parle pas du tout des mêmes sensations de conduite, ni du même budget. Et puis, en choisissant la Boxster, vous optez pour le club des puristes.
Exact aussi que la Boxster a une petite soeur dont les compétences routières sont au moins aussi grisantes, si ce n’est pas plus : la Cayman. Outre sa dizaine de chevaux supplémentaires, son toit dur ajoute au châssis une rigidité qui améliore le caractère incisif de la conduite. Si la Boxster est un scalpel, la Cayman est un laser. D’ailleurs, c’est bien l’une des rares fois où un coupé se vend plus cher qu’un cabriolet.
Mais, justement, cette jouissance de rouler à ciel ouvert se veut un argument de poids tout en faveur de la Boxster. Dans sa version de base, le moteur six cylindres à plat de 2,7 litres promet 265 CV, le sprint de 0 à 100 km/h en moins de 6 secondes et une vitesse maximale au-delà de 260 km/h.
Avec la Boxster S, la cylindrée et la puissance du H6 gonflent respectivement à 3,4L et 325 CV. On se rapproche d’un chrono de 5 secondes et on le fracasse même en activant le programme Sport Plus.
La GTS exploite aussi le 3,4L mais en extraie plutôt 330 chevaux. Nous sommes désormais dans la cour de la 911 mais avec des kilos en moins. Ça vous laisse présager ce qui s’ensuit, n’est-ce pas ? Que du merveilleux ! Au choix, une boîte manuelle à 6 vitesses ou une automatique à double embrayage et 7 rapports, plus rapide, plus économe, plus chère, une merveille d’efficacité technologique mais qui n’empêche pas la manuelle, une race menacée d’extinction, de magnifiquement servir les desseins de la GTS.
Une direction à crémaillère ajustée jurerait-on par le meilleur maître horloger de Genève, et néanmoins assistée électriquement, assure que les montes de 20 pouces (18 et 19 pour les deux autres Boxster) obéissent au doigt et à l’oeil, sauf dans le stationnement d’un centre commercial négocié à vitesse d’escargot car les pneus larges rouspètent alors à chaque braquage. Le centre de gravité bas, et même abaissé d’une vingtaine de millimètres dans le cas de la GTS, profite de la répartition avant/arrière quasiment parfaite de 46%/54%, de sorte qu’un aimant surnaturel nous attache au macadam sans qu’on le sache.
Dans le cockpit, le volant à la fois précis comme le gouvernail d’un gagnant de la Route du Rhum et doux comme la caresse d’un chérubin grâce à sa gaine de suède, l’instrumentation digne d’un jet et prête pour la piste, les sièges plus enveloppants qu’un plastron d’épéiste et la sensation continuelle d’habiter le cénacle des pilotes, font qu’on ne veut plus le quitter, ce qui de toute façon n’est pas facile à faire vu les contorsions exigées pour réellement quitter le bolide.
Vous aurez peut-être compris que ma semaine d’essai au volant de cette automobile m’a consolé de ne pas avoir connu le paradis de nos parents communs, Adam et Ève. Bien sûr, la GTS (à partir de 83 900$) exige une tirelire plus imposante qu’une Boxster de base (à partir de 57 500$), sans oublier les inévitables options encore plus onéreuses dont le fabricant allemand a le secret. Mais si on n’a qu’une vie à vivre, il n’y a aussi qu’une Porsche Boxster GTS.