Turquie

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Le Barreau du Haut-Canada est très préoccupé par la persécution de neuf avocats des droits de la personne en Turquie.

Nos sources indiquent que le 16 mars 2016, la police a fait des descentes aux domiciles de neuf avocats à Istanbul, en Turquie. Les avocats suivants ont été mis en détention par la police : Ramazan Demir, İrfan Arasan, Ayşe Acinikli, Hüseyin Boğatekin, Şefik Çelik, Adem Çalışçı, Ayşe Başar (Gösterislioglu), Tamer Doğan et Mustafa Rüzgar.

Les neuf avocats étaient tous membres de l’Association des avocats pour la liberté (Özgürlükcü Hukukçular Derneĝi [ÖHD]). Chacun de ces avocats représentait un ou plusieurs des 46 avocats arrêtés en 2011 alors qu’ils défendaient le chef du Parti des travailleurs kurdes (« PKP »), soupçonné de « collaborer avec ou d’appartenir à un groupe terroriste ».

Le 18 mars 2016, Ramazan Demir, İrfan Arasan, Ayşe Acinikli, Hüseyin Boğatekin, Şefik Çelik, Adem Çalışçı, Ayşe Başar (Gösterislioglu), Tamer Doğan et Mustafa Rüzgar étaient présents au Tribunal pénal no 1 pour une audience préliminaire sur leur libération provisoire. Irfan Arasan et Mustafa Rüzgar ont été libérés sans condition. Suite à une audience préliminaire de 13 heures ayant eu lieu le lendemain, la Cour a ordonné la libération provisoire des sept autres avocats, sous réserve d’une interdiction de voyager.

Le 21 mars 2016, le procureur en a appelé de l’ordre de libération provisoire auprès du Tribunal pénal no 1, mais n’a pas obtenu gain de cause. Le même jour, sans avertir les accusés ou leurs avocats, le procureur en a appelé de la décision auprès du Tribunal pénal no 2. Le Tribunal pénal no 2 a rapidement renversé l’ordre de libération provisoire du Tribunal pénal no 1 pour quatre des avocats, soit Hüseyin Boğatekin, Ramazan Demir, Ayşe Acınıklı et Ayşe Başar (Gösterislioglu). Le 22 mars 2016, des mandats ont été lancés en vue de leur arrestation. Deux des avocats ont été arrêtés immédiatement, mais ont été relâchés deux jours plus tard. Le 6 avril 2016, les avocats Ramazan Demir et Ayşe Acinikli ont été arrêtés de nouveau.

Les organisations Lawyers for Lawyers et Fair Trial Watch ont adressé une lettre conjointe à Kenan Ipek, ministre de la Justice, suite à l’arrestation des avocats le 18 mars 2016. Le 24 mars 2016, Lawyers’ Rights Watch Canada est intervenu au nom des neuf avocats dans une lettre adressée à Recep Tayyip Erdoğan, le président de la Turquie, et à Ahmet Davutoglu, le ministre des Affaires étrangères. Dans cette lettre, l’organisation souligne que la détention d’un ou plusieurs des avocats en vertu de la décision du Tribunal pénal no 2 du 22 mars 2016 serait « arbitraire et contraire à la loi ». Elle souligne aussi que « les audiences du 21 mars contrevenaient aux droits à la notification, à un procès juste, à la présomption d’innocence, à ne pas être détenu arbitrairement et à être jugé par un tribunal indépendant, impartial et compétent. »

Le Barreau presse le gouvernement de Turquie de respecter les principes 16 et 23 des Principes de base des Nations Unies relatifs au rôle du barreau.
Le principe 16 prévoit ce qui suit :
« Les pouvoirs publics veillent à ce que les avocats a) puissent s’acquitter de toutes leurs fonctions professionnelles sans entrave, intimidation, harcèlement ni ­­ingérence indue ; b) puissent voyager et consulter leurs clients librement, dans le pays comme à l’étranger ; et c) ne fassent pas l’objet, ni ne soient menacés de poursuites ou de sanctions économiques ou autres pour toutes mesures prises conformément à leurs obligations et normes professionnelles reconnues et à leur déontologie. »

Le principe 23 prévoit ce qui suit :
« Les avocats, comme tous les autres citoyens, doivent jouir de la liberté d’expression, de croyance, d’association et de réunion. En particulier, ils ont le droit de prendre part à des discussions publiques portant sur le droit, l’administration de la justice et la promotion et la protection des droits de l’homme et d’adhérer à des organisations locales, nationales ou internationales, ou d’en constituer, et d’assister à leurs réunions sans subir de restrictions professionnelles du fait de leurs actes légitimes ou de leur adhésion à une organisation légitime. »

Le Barreau exhorte le gouvernement de Turquie :
a. à retirer les accusations qui pèsent contre tous les avocats nommés plus haut d’avoir « fait de la propagande pour un groupe terroriste » et « collaboré avec, ou appartenu à, un groupe terroriste » ;
b. à invalider l’ordonnance du 22 mars immédiatement et sans condition ;
c. à mettre fin à tous les actes de harcèlement contre Mes Ramazan Demir, İrfan Arasan, Ayşe Acinikli, Hüseyin Boğatekin, Şefik Çelik, Adem Çalışçı, Ayşe Başar (Gösterislioglu), Tamer Doğan, Mustafa Rüzgar et autres avocats et défenseurs des droits de la personne en Turquie ;
d. à garantir tous les droits de procédure qui devraient être accordés à Ramazan Demir, İrfan Arasan, Ayşe Acinikli, Hüseyin Boğatekin, Şefik Çelik, Adem Çalışçı, Ayşe Başar (Gösterislioglu), Tamer Doğan et Mustafa Rüzgar ;
e. à garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de Ramazan Demir, İrfan Arasan, Ayşe Acinikli, Hüseyin Boğatekin, Şefik Çelik, Adem Çalışçı, Ayşe Başar (Gösterislioglu), Tamer Doğan et Mustafa Rüzga ;
f. à assurer en toutes circonstances le respect des libertés et droits fondamentaux de la personne conformément aux normes internationales en matière de droits de la personne et aux instruments internationaux.

Le Barreau du Haut-Canada est l’organisme régissant plus de 49 000 avocates et avocats et 7 900 parajuristes dans la province de l’Ontario au Canada et la trésorière en est le chef. Le mandat du Barreau est de réglementer la profession juridique dans l’intérêt du public en maintenant l’indépendance, l’intégrité et l’honneur de la profession juridique pour faire progresser la cause de la justice et la primauté du droit.