Un scrutin véritablement démocratique

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Un scrutin véritablement démocratique

Par André Gagnon

A l’instar d’autres corporations professionnelles du Québec, le Barreau du Québec tient une élection au Bâtonnat marquée parfois de soubresauts mais finalement assez sobre.

Deux candidats s’affrontent, avocats tous deux de pratique privée, Me Lu Chan Khuong de Québec, Bâtonnière élue en 2015 puis déchue, et Me Paul-Mathieu Grondin de Montréal. Ce dernier, élu au conseil du Barreau il y a deux ans, s’est porté candidat lors du désistement de la Bâtonnière sortante, Me Claudia P. Prémont de Québec qui avait été désignée par le CA pour succéder à Me Khuong dans les circonstances que l’on connait. Elle n’avait pas été élue comme le prévoyait la nouvelle gouvernance du Barreau au suffrage des membres de l’Ordre.

Paul-Mathieu Grondin a été président du Jeune Barreau de Montréal et fait figure de nouvel arrivant sur la scène juridique du Québec ce qui ne l’empêche pas d’avoir des idées comme la transparence. L’emploi des jeunes avocates et avocats et un Barreau sain, ouvert et inclusif lui tient à cœur. C’est déjà tout un programme.

Depuis plus de 30 ans, le Barreau du Québec a connu des moments de grande opacité pour en arriver petit à petit avec l’essor du Code des professions et de l’Office des professions et l’émergence du Conseil Interprofessionnel du Québec (CIPQ) et de leurs transformations réciproques à faire évoluer dans le sens de la modernité un Ordre qui traditionnellement était tourné beaucoup sur lui-même.

Aujourd’hui, le Barreau du Québec avec sa diversité interne et ses programmes multiples de formation obligatoire et son implication au niveau international s’est taillé une place enviable parmi les grands barreaux de la planète et cela en deux langues. Ce qui permet d’être à l’écoute des juristes français et francophones, et anglophones avec ses liens avec le American Bar Association et autres organismes voués au développement de la profession juridique et du droit.

Les faits d’armes de Me Khuong sont connus. On n’a qu’à consulter sa page Facebook pour voir ses accomplissements. Elle avait dit il y a deux ans qu’elle reviendrait. Elle a tenu parole. Elle jouit d’une popularité certaine mais elle déplaît souverainement à certains ténors du Barreau que l’on retrouve surtout dans les grands cabinets de Montréal et qui forment l’establishment du Barreau du Québec.

Cette histoire de vol à l’étalage réel ou faux lui a mis un fardeau sur le dos qui pourra lui nuire lors de ce scrutin du 12 mai. Cependant, beaucoup de membres du Barreau n’en tiennent pas compte et lui offrent encore une fois leur appui.

Me Deshaies, qu’elle a littéralement battu à plate couture en 2015, n’avait pas réussi à faire sortir le vote selon l’expression consacrée. Il avait dû se contenter d’un maigre 35 ou 36 % des voix exprimées. Me Grondin, membre du conseil du Barreau du Québec, issu d’un cabinet de petite taille, fera-t-il mieux que l’ancien candidat pourtant issu d’un grand cabinet de Montréal ?

Les finances du Barreau du Québec à la lumière du dernier rapport annuel avec ses deux millions annuellement perçus en intérêts des banques sur les comptes en fidéicommis des clients des cabinets semblent montrer une assez bonne gestion. Beaucoup d’avocats, surtout les jeunes, trouvent onéreux de payer à la fois cotisation et frais d’assurance professionnelle même si des moyens peuvent leur être offerts pour les accommoder. Après un stage souvent peu ou non rémunéré et des dettes d’études accumulées, leurs débuts en pratique privée sont difficiles. Ceux qui ont pu trouver un emploi peuvent mieux s’en sortir qu’elles et eux. Mais voilà des talents d’entrepreneur sont exigés des jeunes juristes aujourd’hui pour survivre. Les plus forts et les mieux équipés survivent. Les autres doivent regarder ailleurs où réorienter leur carrière. Il y a trop d’avocats clamaient le Jeune Barreau de Montréal et ABC-Québec à un moment ou l’autre.

C’est sur cette toile de fond que se déroulera ce scrutin pour un mandat de deux ans au Bâtonnat.

Que la ou le meilleur gagne. Il faut aller voter c’est-à-dire après s’être inscrit utiliser son ordinateur pour faire triompher la démocratie au Barreau du Québec.