Décès de l’ex-ministre Marc-André Bédard (LL.L. 1959)
Par Me Pierre Thibault, doyen adjoint de la Faculté de droit civil de l’Université d’Ottawa.
Un grand homme nous a quittés. Géant de la politique québécoise, homme de conviction et ardent défenseur des droits et libertés, M. Bédard a été ministre de la Justice de 1976 à 1984.
Originaire du Lac-Saint-Jean, Marc-André Bédard a obtenu sa licence de la Section de droit civil de l’Université d’Ottawa en 1959, puis été admis au Barreau du Québec l’année suivante. Il a exercé la profession d’avocat à Chicoutimi jusqu’à son élection, en 1973, dans cette même circonscription sous la bannière péquiste.
L’avocat de formation a été nommé ministre de la Justice le 26 novembre 1976, poste qu’il occupera jusqu’en 1984 aux côtés de René Lévesque, dont il était particulièrement proche. Le créateur du conseil de la magistrature n’a pas hésité à modifier la Charte des droits et libertés en 1977 pour y corriger une injustice criante : la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle. En 1982, il s’attaque cette fois à une autre faiblesse du texte – le fait qu’elle ne s’appliquait qu’aux nouvelles lois et non à celles en vigueur.
« Je voulais une vraie charte. Pour avoir une vraie charte, il fallait qu’elle s’applique à l’ensemble des lois », avait-il confié à La Presse lors d’une entrevue à l’été 2019. Parmi ses autres grandes contributions à la justice, il a notamment modernisé le droit familial en remplaçant le concept d’autorité paternelle par celui d’autorité parentale.
Ministre d’État à la Réforme électorale, leader parlementaire du gouvernement, vice-premier ministre, solliciteur général, ministre délégué à la Réforme électorale – M. Bédard cumulera au fil des ans des responsabilités qui témoignent de son ardeur à l’ouvrage et de l’estime que lui vouaient ses collègues.
Déclinant de se présenter aux élections de 1985, l’homme de loi est revenu à ses premières amours, la pratique du droit. Dans les années qui ont suivi, il a multiplié ses apports à divers conseils d’administration (Société nationale de fiducie, Fondation Universitas du Canada, Musée du Saguenay et autres) et présidé les campagnes de financement de nombreux organismes de bienfaisances, dont la Maison Jean Lapointe, la Croix-Rouge et la Moisson Saguenay–Lac-Saint-Jean.
M. Bédard a reçu le prix Lutte contre l’homophobie décerné par la Fondation Émergence du Québec, de même que la médaille du mérite du Barreau du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Il a été fait avocat émérite du Barreau du Québec en 2007 et été décoré de l’Ordre national du Québec en juin 2013.
« Marc-André Bédard a été non seulement un remarquable ministre de la Justice, très sensible à l’évolution de la société québécoise et à la nécessité d’adapter de larges pans de sa législation, mais également un juriste de grande trempe, de souligner le professeur Denis Nadeau. Son humanisme et ses engagements politiques et sociaux demeureront gravés dans les mémoires de toutes les personnes qu’il a croisées. »
La Section de droit civil tient à offrir ses condoléances à la famille et aux amis de Marc-André Bédard, y compris à son fils Éric, aussi diplômé de notre Faculté. L’héritage juridique de M. Bédard aura contribué à faire du Québec une société plus juste.