Équiterre et la Fondation David Suzuki applaudissent la décision du gouvernement fédéral d’éliminer un pesticide néonicotinoïde, mais l’échéance de 3 à 5 ans est inacceptable
Santé Canada a annoncé hier une proposition visant à éliminer progressivement l’imidaclopride, un pesticide néonicotinoïde largement utilisé en agriculture au Canada, dans un délai de trois à cinq ans. La proposition repose sur de nouvelles découvertes selon lesquelles l’imidaclopride pose des risques inacceptables pour les insectes aquatiques, comme les moucherons et les éphémères, qui sont d’importantes sources alimentaires pour les poissons, les oiseaux et d’autres animaux.
Étant donné les risques reconnus dans l’évaluation provisoire et les concentrations élevées de ce produit retrouvées dans les eaux de surface au Canada, Équiterre et la Fondation David Suzuki estiment que le calendrier proposé est inacceptable. «D’autres juridictions ont agi de manière décisive, comme l’interdiction faite en France visant tous les néonicotinoïdes qui entrera en vigueur en 2018», a déclaré Nadine Bachand, chargée de projet chez Équiterre.
La recherche démontre que la gestion intégrée des ravageurs et d’autres pratiques exemplaires sont actuellement disponibles pour remplacer ces pesticides dans la lutte aux ravageurs des cultures. «Les néonicotinoïdes sont largement utilisés prophylactiquement dans les cultures de maïs et de soja, à travers des enrobages de semences, que l’agriculteur ait effectivement un problème d’insectes nuisibles dans ses champs ou non. Nous devons adopter rapidement les approches de lutte intégrée, largement acceptées en Europe», a ajouté Louise Hénault-Ethier, chef des projets scientifiques pour la Fondation David Suzuki à Montréal.
En outre, bien que plusieurs utilisations soient couvertes par cette mesure, l’utilisation à l’intérieur et autour des maisons et des bâtiments ou pour le traitement des animaux de compagnie (puces, tiques et poux) ne sont pas couvertes, une omission condamnée par les organisations.
Santé Canada a également annoncé hier un examen spécial de deux autres types de néonicotinoïdes, la clothianidine et le thiaméthoxame, afin d’évaluer les risques pour la faune aquatique. En règle générale, les examens spéciaux entrepris par l’ARLA prennent en moyenne deux ans pour être complétés. Équiterre et la Fondation David Suzuki recommandent donc que ces examens spéciaux soient achevés en priorité et conclus promptement.
Le groupe de travail sur les pesticides systémiques (TFSP), un groupe de 50 chercheurs internationaux, a examiné plus de 1 100 articles scientifiques revus par les pairs et a constaté que les néonicotinoïdes sont persistants et omniprésents dans l’environnement et posent un risque inacceptable pour la biodiversité, entre autres pour les vers de terre et les pollinisateurs.
Contrairement à l’évaluation du TFSP, Santé Canada a conclu que l’imidaclopride ne présentait aucun risque ingérable pour les abeilles et les pollinisateurs indigènes en janvier 2016. L’évaluation préliminaire des risques pour les pollinisateurs concernant le thiamétoxame et la chlotianidine devrait être publiée d’ici la fin de 2017. Les évaluations restreintes aux risques pour les pollinisateurs ou aux insectes aquatiques pourraient empêcher de prendre en considération de nouvelles découvertes concernant les effets potentiels sur la santé humaine.