Quelques conseils aux avocats qui voyagent en territoires à sécurité minimale
Par Marcel Bergeron MSC, M.SC
Marcel Bergeron est un expert en sécurité qui effectue des missions en pays exposés à des risques en Afrique, au Moyen-Orient et autres depuis des décennies tant pour les Nations Unies que des sociétés multinationales, des gouvernements, la monarchie d’Arabie Saoudite, des fondations américaines comme celle du Président Jimmy Carter et autres. Il a rédigé cet article à la demande expresse du Monde Juridique pour ses lectrices et lecteurs qui peuvent être exposés à des risques de sécurité.
Vous allez résider à l’hôtel dans un pays considéré comme dangereux (i.e. où une mission de paix des Nations-Unies, de l’OTAN et de toute assistance armée d’un pays ou d’une coalition de pays y est déployée; et ceci même dans les mois précédant l’arrivée ou le départ de ce type de mission); lisez bien ce qui suit : Avant le départ, enregistrez-vous auprès du Ministère des Affaires Étrangères canadien par internet sur http://voyage.gc.ca/voyager/inscription afin qu’on sache où aller vous chercher en cas d’urgence ou d’évacuation. S’il n’y a pas d’ambassade du Canada là-bas, identifiez l’ambassade qui s’occupe des Canadiens en cas d’urgence dans la section «conseils aux voyageurs» sous l’onglet «voyage» au haut de la page du site. Trouvez également les coordonnées du consul honoraire du Canada souvent en place dans les pays où nous n’avons ni ambassade ou consulat.
Consultez aussi les sites internet des conseils aux voyageurs du Canada et ceux des États-Unis, de la France, de la Grande-Bretagne, de la Suisse, de l’Australie, de la CIA, etc.; allez aussi voir sur www.reliefweb.int pour les urgences humanitaires et naturelles. Visionnez le site canadien de l’ambassade du pays de destination et les sites de presse (RDI, CNN, BBC, RFI, TV5, AlJazeera.net, China.org.cn, etc.). Apprenez quelques mots du langage locale, on appréciera cette marque de considération, peu importe votre accent. Sachez qui viendra vous accueillir à l’aéroport. Partez avec des $US et/ou des Euros et des devises locales si disponibles. D’autre part, obtenez tout de suite un visa à entrées et sorties multiples; plus cher, mais combien plus pratique à l’usage. Consultez la clinique voyage la plus proche pour recevoir avant de partir tous les vaccins nécessaires.
Présentez-vous chez CAA pour obtenir votre permis de conduire international. Partez avec un stock excédentaire de médicaments que vous achèterez ici (ceux achetés sur place peuvent être de fabrication frauduleuse). Les organismes ou entreprises présentes dans ces endroits non-sécuritaires devraient normalement y avoir un directeur de sécurité. Contactez ces spécialistes par E-Mail ou par Skype avant de partir car ils seront en mesure de vous expédier un dossier de sensibilisation des visiteurs. Faute de quoi, vous pouvez toujours contacter le chargé de sécurité de l’ambassade du Canada pertinente, le RSO (Regional Security Officer) de l’Ambassade américaine ou un FSO (Field Security Officer) des Nations-Unies ou de toute grande ONG internationale. Les attachés militaires en poste dans les ambassades sont une ressource alternative. Mais si on ne peut vous mettre en contact avec ces spécialistes au départ, refusez de partir jusqu’à ce que la situation se normalise ou s’améliore un peu; de toute façon, vous ne pourrez pas faire grand chose en présence de couvre-feu, de pénurie de nourriture ou d’électricité et si il vous faut porter régulièrement une veste anti-balle et vous déplacer avec une escorte armée, laissez cela aux spécialistes qui ont déjà acquis une grande expérience de ce type d’environnement.
De fait si vous n’arrivez pas à rassurer suffisamment les gens de votre entourage qui vous sont chers, il y a de grosses chances que l’idée de ce départ ne soit pas bonne. Pourquoi revenir au pays avec un choc post-traumatique ?
À l’arrivée à l’hôtel : On doit venir vous chercher à l’aéroport, mais dans ces cas-ci votre correspondant ou son représentant doit vous attendre dès la sortie de l’appareil sur la piste ou à l’entrée de l’aérogare avant les postes des douaniers, des instances sanitaires et l’aire de récupération des bagages.
Après les formalités remplies, quittez l’aérogare en compagnie de votre escorte et rendez-vous tout de suite à votre hôtel. N’hésitez pas à demander quelles sont les mesures de sécurité qui vous protègeront. Si vous n’êtes pas satisfait, changez d’hôtel ou demandez d’habiter dans une résidence bien protégée.
Si les mesures de sécurité sont insuffisantes (le gros bon sens vous l’indiquera facilement), informez qui de droit et commencez à songer à quitter le pays, quitte à y revenir plus tard. Les gens en général n’ont aucune idée de la vitesse à laquelle les pays peuvent basculer en moins de vingt-quatre heures dans l’horreur. Sur place à l’hôtel : Votre chambre devient votre refuge en cas d’incident jusqu’à ce qu’on vienne vous chercher. Cette chambre ne doit pas être dans les bas étages (ni trop haut non plus car les services d’incendie disposent rarement de grandes échelles), sa porte doit être munie d’un oeil magique, d’une bonne serrure, d’un cadrage solide, de bons verrous aux fenêtres, d’une petite réserve d’eau et de denrées nutri- tives, de piles de recharge d’appoint pour votre cellulaire. Considérez installer un petit système d’alarme portatif à pile sur la porte avant de vous coucher; bloquez la porte avec une chaise ou un fauteuil. Dès les premières heures de votre arrivée, demandez qu’on vous accompagne dans une visite complète du site avant de vous familiariser avec toutes les sorties disponibles. Rien de mieux, si possible que de prendre la fuite dès le début d’un évènement (sinon enfermez-vous dans votre chambre). A cet effet, gardez toujours auprès de vous une pochette qui contient tous vos documents importants, votre argent, votre cellulaire et son chargeur (avec un adaptateur de prise compatible), vos médicaments, ainsi qu’une clé USB contenant les numérisations de vos documents d’identité, billet d’avion, carnet de vaccination, vos clés, etc., car l’expérience a prouvé qu’il est impossible lors d’une évacuation d’emporter tous ses bagages ou encore de pouvoir retourner à l’hôtel avant plusieurs heures/jours une fois évacué.
Vous trouverez sur le site suivant du Secrétariat d’État Américain, les recommandations données aux citoyens américains (pourquoi ce site? Parce ce que sont eux en général qui sont pour diverses raisons les cibles les plus attrayantes et que nos sites canadiens n’englobent pas en un seul texte de façon si concise, l’ensemble des risques auxquels est exposé le voyageur d’affaires), en plus d’une multitudes de mesures de sécurité applicables à l’étranger, les chapitres II à VII font référence à la sécurité des voyageurs à l’hôtel : http://www.state.gov/documents/organization/19795.pdf
De toute façon à l’étranger nous passons pour des nord-américains et il est probable qu’on ne vous demandera pas de parler avec votre plus bel accent québécois avant de vous tirer dessus ou de vous menacer.
Cependant, le gouvernement canadien a publié un excellent ensemble de mesures sur la cyber-sécurité en voya- ge et donc à l’hôtel. En effet, les hôtels dans les pays à économies émergentes et même ailleurs ne respectent pas toujours les règles les plus élémentaires pour protéger leur système LAN, leur Wi-Fi, etc. La lecture du site http://voyage.gc.ca/voyager/sante-securite/cybersecurite vous aidera à protéger votre information confidentielle. Au sujet de l’information confidentielle, la plus grande discrétion sur vos activités et vos déplacements s’impose dans un hôtel, il y a des oreilles partout. De plus, ne laissez pas trainer à la vue vos documents dans votre chambre et d’autre part, rencontrez toujours vos visiteurs d’abord dans les endroits publics de l’hôtel.
Bon voyage et bon séjour à l’hôtel.